Maurin des Maures est un feuilleton télévisé français de Jean Canolle et Claude Dagues en 26 épisodes, diffusé pour la première fois en 1970 sur la première chaine de télévision de l'ORTF.

Le feuilleton raconte les aventures de Maurin, un braconnier sympathique qui exerce son « art » dans le Massif des Maures. Il est poursuivi par les gendarmes, notamment Sandri de la fiancée duquel il est amoureux.

Durée : Feuilleton en 26 épisodes de 15 minutes chacun.

Date de première diffusion : mercredi 21 janvier 1970 sur la première chaîne de l'ORTF. Il était diffusé du lundi au vendredi, à 19h25.

A propos de Sainte-Maxime, cela vous dit quelque chose : [Oh oui ! j'adore me baigner, maintenant je sais nager - Seras-tu aux prochaines vacances à l'Hôtel Beau Rivage ? - Mais dis donc, comment tu connais l'Hôtel Beau Rivage ? Tu y as été toi à Sainte-Maxime ?], un indice : c’’est l’un des plus grands succès de Claude François, en 1974 (mélodie inspirée d'un film américain). Aujourd’hui, l'Hôtel Beau Rivage n’existe plus, il a été repris par la chaîne hôtelière américaine « Best Western ».

Seras-tu aux prochaines vacances à l'hôtel Beau-Rivage ?

Aimes-tu la plage ?

     Oh oui ! j'adore me baigner ; maintenant je sais nager

      Mais dis donc, comment tu connais l'hôtel Beau-Rivage

      Tu y as été toi, à Sainte-Maxime ?"...    

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L'OPERATION " mille clubs de jeunes " a été lancée en 1968 par M. François Missoffe, alors ministre de la Jeunesse et des sports. Bien que son financement n'ait pas été prévu par la deuxième loi de programme d'équipements sportifs et socio-éducatifs, elle a été menée à terme, et même au-delà. En effet, plus de mille locaux-clubs ont déjà été livrés : environ cinq cents " B.S.M. " - maisons de bols bleues, blanches et brunes aux curieux toits formés d'éléments semi-cylindriques - et plus de six cents " S.E.A.L. " - petits bâtiments plus sobres, rouges et gris, en matériaux modernes, de l'avis général esthétiquement plus réussis que les précédents.

Cette opération répondait à deux préoccupations principales. Elle partait, d'une part, du constat de l'échec relatif de la politique suivie par M. Maurice Herzog pour les maisons des Jeunes et de la culture, qui s'étalent multipliées depuis 1960. Toutefois, malgré les efforts financiers de l'Etat et des collectivités locales, elles ne parvenaient à toucher qu'une faible partie des jeunes de quinze à vingt-cinq ans - dont le nombre augmentait considérablement du fait de la poussée démographique de l'après-guerre, - particulièrement dans les milieux ouvriers et ruraux. D'autre part, le nouveau ministre manifestait une certaine défiance envers les mouvements et les organisations de jeunesse, et avait l'ambition de s'adresser directement aux jeunes " inorganisés ".

Il fallait donc mettre en place des équipements plus légers (les locaux-clubs occupent 160 mètres carrés au sol), faciles à construire dans n'importe quelle zone d'habitation, destinés à un nombre limité d'occupants. L'opération devait se dérouler de la manière suivante : l'Etat fait réaliser en série mille clubs, dont il fait don, en pièces détachées, aux communes qui en font la demande et qui fournissent le terrain. Les services de la jeunesse et des sports facilitent la création sur place d'une association de jeunes à laquelle sera confiée le local. Ces jeunes assurent sa construction, la collectivité se chargeant des fondations et de la dalle de béton qui supportent l'édifice, des adductions d'eau et d'électricité, du chauffage.

Le photographe Raphaël Firon nous présente les Mille-clubs, un projet initié dans les années 1960 par le ministère de la Jeunesse et des Sports afin d’unir toute une génération.

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C’était en 1967, la jeunesse française aspirait à plus de liberté. C’est alors que le ministre de la Jeunesse et des Sports lance le projet "opération Mille-clubs" : des lieux qui permettront aux jeunes de se rencontrer, d’échanger et de construire leurs propres espaces de vie sociale. Chaque club doit être identique, quelle que soit la région ou la taille de la commune – urbaine ou rurale –, et assurer un accès égalitaire aux animations socioculturelles sur tout le territoire.

Les Mille-clubs sont prévus pour être aménagés d’un intérieur avec un coin "veillées" permettant l’installation de fauteuils ou chaises autour d’une cheminée. En plus d’une petite cuisine et d’un coin "jeux" suffisamment grand pour contenir au moins un billard et un baby-foot, le tout, à la charge de la municipalité. Cependant, après la construction des clubs entre 1968 et 1982, ce sont aux jeunes, éducateurs et bénévoles d’organiser des activités et d’entretenir les clubs : un moyen de les responsabiliser.

Mais cela n’aura duré qu’un temps. En effet, l’emplacement des structures n’était pas stratégique, car elles étaient le plus souvent implantées dans de petites communes. Il n’y avait donc pas assez d’enfants et adolescents pour s’investir totalement dans la vie des Mille-clubs. C’est alors qu’avec le temps, ces salles ont commencé à accueillir des activités plus familiales : cours de peinture, de tricot et même tournois de bridge. On pouvait même louer ces espaces pour des mariages, ce qui les réaffecta en salles publiques et polyvalentes multigénérationnelles. Aujourd’hui, la plupart de ces clubs ont été abandonnés, ou rasés, d’autres sont en attente de réhabilitation, mais quelques-uns continuent toujours d’être exploités pour diverses activités.

"La mémoire s’évanouit et embellit les choses. Alors que les images restent intègres"

Intéressé par ce sujet, Raphaël Firon, photographe et vidéaste, s’en est allé parcourir la France pour aller à la découverte de ces Mille-clubs. De Delme à Gérardmer en passant par Bitche, le photographe nous offre un tour d’horizon de tous ces petits villages français, et nous livre une série d’images ravissante. Pour l’artiste : "Toute personne qui fait un arrêt sur image à un moment donné, quel que soit le medium, est un témoin de son temps. La mémoire s’évanouit et embellit les choses. Alors que les images restent intègres."

Son travail porte majoritairement sur l’architecture, le paysage, et le côté chaotique de l’urbanisme. Il ne rejette pas l’humain dans la photographie ou dans l’image en général, néanmoins, il juge que l’acte photographique est une affaire qui nécessite de la solitude : "On est toujours seul à regarder dans son viseur", peut-on lire sur son site. Sa série Une utopie française est douce, lumineuse et colorée, mais reste en même temps très épurée. De quoi offrir un léger brin de poésie dans l’architecture de toutes ces petites communes, et de tous ces clubs oubliés.

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Les années ont passé, mais, ces photos me permettent de revenir sur ses belles et magnifiques années que nous vivions dans l'insouciance, pleine de joie et de liberté, et là je me dis y a un grand mur qui nous sépare celui de ses belles années, aujourd'hui plus rien, juste chacun pour soi, mon âge me rappelle que moi aussi j'ai été jeune mais c'était une autre vie et un autre monde.

Notre vie a été les années 60 70, celles de la liberté sans contrainte, pouvoirs vivre comme on le voulait pas de couvre feux, des chansons et des tubes, sur lesquels on dansait, jamais un jour seul tjr avec une filles, que l'on draguait, ou qu'elle nous draguait, c'était une époque formidable, nous étions polies et respectueux, certes des bagarres dans ses vieilles salles des fêtes, mais avec nos poings, pas des couteaux ou kalachnikov, on ne tuai pas pour une clope ou un regard de travers, alors ceux qui ont mon âge on connut tout cela, maintenant on nous dit les vieux fermés là vous connaissez rien à la vie ils n'ont pas compris, que le meilleur et passé et que le pire arrive, quel avenir pour eux, j'ai arrêté de me poser la question, car leurs parlez et une perte de temps, j'ai rien devant moi, qui me donnera mieux que ce que j'ai vécu, alors j'ai arrêté de me prendre la tête pour ses imbéciles qui non rien compris et se croient meilleurs que nous.

• Bien écrit et véridique, de même de cette époque, je constate que nos belles meilleures années se sont évaporées. Cordialement.

• Rien ne vaut ce qu'on a passé, nous enfants des années 60 - 70. Belle époque que j'ai apprécié, né en 61. Le disco quand on avait 17, 18 19 20 ans, que du bonheur.

• Le bon temps, des chanteurs magnifiques des films aussi, des nouvelles danses, la belle jeunesse pourtant pas friquée...Le bon temps

• C'est peut-être de notre faute que ça tourne mal aujourd'hui...

• Non nous n'y sommes pour rien, c’est l'avenir qui prend le dessus à tjr vouloir plus, les temps changent mais pas nous, nous sommes restés dans notre passé pour continuer à le faire vivre, bientôt plus personne n'en parlera 

• Très beau. Et très juste commentaire. Et OUI c’était ça notre. Jeunesse. Et pour ma part j’en suis très fière

• Hélas oui nous avons connu une adolescence simple heureuse rencontrer des amis dans les bals même si quelquefois en fin de soirée alcool aidant il y avait des bagarres pour une fille si elle avait un " ami " qui la défendait mais rien de méchant c'est évident que nos jeunes ne connaissent que des rencontres où il y a de l'alcool des cigarettes et la drogue.

• Quelle époque, belles années, que de souvenirs, insouciance, plaisirs de la vie, éducation, respect, et oui.

• Oui une très belle jeunesse

• Les bals à sabots de la maison du peuple de Monsville

• Mais que tu as raison Les filles s'habillaient en short ou en mini-jupe on ne les traitait pas de salope.

• On savait s'amuser rire Oui c'était une belle époque qu'il ne connaîtront jamais

• Maintenant c'est couteaux, gros calibre, règlement de compte.

• La vie était meilleure

• Chaque époque à ses avantages et ses inconvénients... Pour moi le « avant c'était mieux » ce n’est vraiment pas mon truc... Avec mes 75 ans au compteur je suis très bien dans notre époque.. La nostalgie c'est bien mais à petite dose....

• Il n'y a pas forcément de la nostalgie, mais il y a un constat.

• Je respect, mais actuellement, elle est où, cette nouvelle vie promis, dans un monde où tout le monde s'en fout, 

• Nos plus belles années

• La meilleure époque

• La meilleure époque que je n oublierais jamais

• Les choses ont changé, avant moins de media....

• Je ressens la même chose nous avons passé des beaux moments nous travaillons 50h par semaine pas de voitures le train le bus pas de week-end juste le dimanche pour se retrouver avec les copains et copines

• C’était le bon temps !

• Le bon temps, contente d’être de cette époque

• L'HOMME EST DEVENU L'INVENTEUR DE SA PROPRE TACTIQUE VITALE. LÀ EST SA GRANDEUR, LÀ AUSSI SERA PERTE.

• Belle époque on travaillait dur et plus tôt vie domestique dure mais vie amoureuse super

On n'ait, pour le plaisir de nos parents, certes il nous ont désiré, comme nous, nous avons désiré les nôtres, chacun pensait leurs donnez une belle éducation pauvre comme riche, mais l'histoire comme l'avenir, n'es pas la même chose, le passez vécut, ne remplacera pas l'avenir, nous avons vécu une enfance et une adolescence, magnifique, où les banlieues n'existait pas, du moins on appelait ça les ZUP, mais nous savions se que ses que le respect, la politesse, et l'humanité, aujourd'hui tout cela a disparue, on tape sur les gendarmes, on brûle des commerce que ses pauvres gens on mit toutes leurs vie pour y arriver, on construit des citée, pour écarter ses personnes indésirables, alors que le mieux aurait été chacun chez soi, on laisse ses migrants, venir chez nous, pour avoir une belle image de se gouvernement d'imbéciles, on les loges les nourrit, alors que des centaines de français ont tout perdus à cause de ses enfoiré comme disait Coluche lui aussi on la fait taire, la France et la plus grande poubelle du monde, et celui qui me traite de raciste, qu'il me le prouve, j'ai des amie étranger mais eux il bossent, alors respect, et pour les autres rentré chez vous, pour une vie meilleure, car vous n'êtes pas capable de réagir, au lieu de se battre, 🤔non on va en France, moi je vous dit allez au diable et venez quand le gouvernement s'occupera des français,39 45 et un souvenirs pour ceux qui voulaient la liberté, et sont morts pour notre pays, alors stops, à l'immigration, comme les Roms les tchetchenne, qui viennent juste pour volé pillées et détruire nos vies

Nous sommes à notre âges dans une vie qui ne peux nous donner mieux que ce que l'on a vécu, années 70 80, on vivait on savait s'amuser sans juger, des réveillons jusqu'à pas d'heure, on ne nous imposait rien, on était libre et heureux de cette jeunesse.

La vie et un don qui nous et donner, sans la réclamer, ses un plaisirs pour ceux qui la donne, certes on et tous heureux d'avoir un fils ou une fille, qu'elle différence aucune, ils ont été élevé, dans notre critère aide politesse et respect de l'autre, mais ce n'est pas le cas, ils vous juges sur votre vie, alors que la leurs n'a plus d'avenir vu comme ses partie nous avons été père et mère, mais à quoi bon toutes les politesses et les façons d'être respectueux n'existe plus, alors à mon âge je me dit que finalement moi j'ai vécu.

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Trafic de drogue : une guerre sans fin à Marseille

Des tonnes de drogues, des dizaines d'armes et des arrestations. La lutte contre le trafic de stupéfiants fait régulièrement la Une des médias. Des points stups à peine démontés, aussitôt remontés. Une guerre sans fin.

Publié le 25/03/2021 à 10h14 • Mis à jour le 26/03/2021 à 11h45

Illustration. Saisie de stupéfiants à Arles et d'Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).

Illustration. Saisie de stupéfiants à Arles et d'Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). • © Direction régionale des douanes d'Aix-en-Provence

Bouches-du-Rhône Marseille

Marseille, 14 mars 2021. Dix-sept personnes sont mises en examen après le démantèlement d'un réseau de trafic de drogue dans une cité des quartiers populaires du nord de Marseille. Une nouvelle fois l'information fait la une.

450 kilos de cannabis sont saisis, 1,3 kilo de cocaïne, 308.000 euros en liquide, des vêtements de luxe pour une valeur de 68.000 euros, et trois armes à feu, dont un fusil à pompe.

Une illustration classique de ce que les enquêteurs saisissent à chaque descente. Et c'est bien là le problème. En quelques jours, le trafic se réorganise et la drogue s'écoule à nouveau. Si les dealers sont frappés, c'est rarement le cas des consommateurs.  

"Le sentiment d'impunité et de toute puissance de ce réseau" était tel explique alors le parquet qu'un message de menace était placardé sur les murs des bâtiments de la cité, pour faire taire les éventuels récalcitrants.

"+ALERTE - Toutes personnes qui souhaite ou envisage (sic) de coopérer avec la police, sachez que nous le saurons et que nous nuirons à votre vie. (...) Merci de faire attentionet de faire les bons choix pour votre sécurité. Nous vivons avec vous tous les jours, eux sont que de passage. ALERTE+".

De nombreux quartiers de la deuxième ville de France sont gangrenés par le trafic de stupéfiants, avec des réseaux qui se professionnalisent et deviennent plus violents, selon des spécialistes de criminologie.

"Sur la décennie écoulée, on constate que les trafics de drogues se professionnalisent. L'organisation est plus structurée, on n'hésite pas à recruter par le biais de Pôle emploi voire même en publiant des petites annonces sur Leboncoin. C'est le signe d'un enracinement du trafic", explique Jean-Baptiste Perrier, directeur de l'Institut de sciences pénales et de criminologie à l'Université Aix-Marseille.

Autre signe caractéristique, le rajeunissement des traficants. Ils apparaissent bien plus jeunes que par le passé. Sur les dix dernières années, il n'est plus rare de voir des mineurs impliqués dans les trafics de stups. Et dans la hiérarchie de la criminalité, un jeune majeur peut se retrouver à la tête d'un réseau.

Selon les derniers chiffres policiers, Marseille compterait 156 "plans stups" (points de deal), dont certains accueilleraient jusqu'à 2.000 clients par jour, pour un chiffre d'affaires quotidien pouvant atteindre les 75.000 euros.

Selon les chiffres de l'Ofast (l'office de lutte contre la drogue, ndlr), les saisies de stupéfiants n'ont jamais été aussi importantes.

En 2020, 96 tonnes de cannabis ont été saisies, 13 tonnes de cocaïne, 1,1 tonne d'héroïne et 1,2 million de comprimés d'ecstasy.

82 millions d'avoirs criminels ont été saisis en 2020, contre 78 millions d'euros en 2019.

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À Marseille, une nouvelle tactique contre les trafics de drogue

Lundi 12 avril 2021 à 16:56 - Par Philippe Boccara, France Bleu Provence

Marseille

Depuis le 1er janvier, 124 opérations de "pilonnage" ont été menées dans toutes les cités de Marseille concernées par les trafics de drogue. L’une d’entre elles s’est déroulée ce lundi à La Castellane (15e arrondissement). Selon la préfecture de police, cette méthode porte ses fruits.

Une opération de Police dans les cités marseillaises

Une opération de Police dans les cités marseillaises © Radio France - Philippe Boccara

Cette méthode de "pilonnage", complémentaire des actions déjà engagées par les services contre les trafics de stupéfiants, est une priorité des forces de l’ordre. C’est une nouvelle méthode plus offensive et plus visible avec notamment des unités de CRS. Il s’agit avant tout d’entraver l’action des trafiquants de manière globale. Cela allège ainsi la pression qu’ils exercent sur les habitants des quartiers et leur vie quotidienne.

Des actions répétées et massives

Depuis le 1er janvier 2021, les 124 opérations de ce type ont mobilisé chacune en moyenne 70 policiers. Elles ont permis l’interpellation de 150 personnes, et la saisie de près de 40 kg de cannabis, près de 800 grammes de cocaïne, sept armes et plus de 17.000 euros. Plus de 1.500 procès-verbaux électroniques ont été dressés, notamment pour usage de stupéfiants visant les consommateurs, des contraventions routières et des verbalisations pour non-respect des mesures sanitaires, et plus de 120 véhicules ont été immobilisés en fourrière.

Une quarantaine d'épaves et plus de près de 300 mètres cubes d’encombrants ont été évacués : un grand nombre de barricades et obstacles montés par les trafiquants pour ralentir la police et contrôler les entrées et sorties dans les cités. Cependant, les trafics sont toujours très présents dans les 156 points de deal marseillais. Chacun peut rapporter jusqu'à 80.000 euros par jour.

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Marseille : 17 mises en examen après le démantèlement d’un réseau de trafic de drogue

C’est une opération coup de poing conduite par quelque 250 policiers mardi 9 mars au cœur d’une cité marseillaise qui a permis de procéder au démantèlement d’un tentaculaire réseau de drogue.

Par Le Figaro avec AFP

Publié le 14/03/2021 à 16:09, mis à jour le 14/03/2021 à 17:13

De la drogue, des armes et des centaines de milliers d’euros en liquide ont été saisies lors de l’opération policière de mardi.

De la drogue, des armes et des centaines de milliers d’euros en liquide ont été saisies lors de l’opération policière de mardi. Sergey Novikov / stock.adobe.com

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2021, l’année du rendement ?

Dix-sept personnes ont été mises en examen après le démantèlement mardi d’un réseau de trafic de drogue dans une cité des quartiers populaires du nord de Marseille, lors duquel plus de 450 kilos de cannabis avaient été saisis, a-t-on appris ce dimanche 14 mars auprès du parquet.

À LIRE AUSSI :À Marseille, Gérald Darmanin muscle son plan de lutte contre la drogue

Cinq d’entre elles, des prête-noms ou des compagnes des trafiquants, ont été placées sous contrôle judiciaire, et onze autres, gérants du réseau ou simples « nourrices », chargées de stocker les produits, ont été placées en détention provisoire, a précisé la procureure de la République de Marseille, Dominique Laurens, dans un communiqué. Le sort réservé à la 17e personne mise examen n’a pas encore été décidé, celle-ci ayant demandé un débat différé devant le juge de la liberté et de la détention.

À LIRE AUSSI :Impacts de balles sur une école : l'appel à l'aide de la maire du 13e arrondissement de Marseille

Lors de l’opération coup de poing conduite par quelque 250 policiers mardi au cœur de la cité de la Savine, dans le 15e arrondissement de Marseille, 465 kilos de cannabis avaient été saisis, ainsi que 1,3 kilo de cocaïne, 308.000 euros en liquide, des vêtements de luxe pour une valeur de 68.000 euros, et trois armes à feu, dont un fusil à pompe.

Un message de menace placardé sur les murs des bâtiments

« Le sentiment d’impunité et de toute puissance de ce réseau » était tel, insiste Mme Laurens dans son communiqué, qu’un message de menace était placardé sur les murs des bâtiments de la cité, pour faire taire les éventuels récalcitrants : « ALERTE - Toutes personnes qui souhaite ou envisage (sic) de coopérer avec la police, sachez que nous le saurons et que nous nuirons à votre vie. […] Merci de faire attention et de faire les bons choix pour votre sécurité. Nous vivons avec vous tous les jours, eux sont que de passage. ALERTE »

À LIRE AUSSI :Pour son maire, Marseille est la grande ville « avec laquelle l’État est le moins généreux »

De nombreux quartiers de la deuxième ville de France sont gangrenés par le trafic de stupéfiants, avec des réseaux qui se professionnalisent et deviennent plus violents, selon des spécialistes de criminologie. Selon les derniers chiffres policiers, Marseille compterait 156 « plans stups » (points de deal), dont certains accueilleraient jusqu’à 2000 clients par jour, pour un chiffre d’affaires quotidien pouvant atteindre les 75.000 euros.

À voir aussi - «La drogue c'est la mère de tous les crimes»: Attal détaille les mesures de lutte contre les trafics de stupéfiants

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Le « narco-banditisme » des cités de Marseille

Des règlements de compte entre bandes rivales ensanglantent la ville depuis une douzaine d’années.

Par Luc Leroux(Marseille, correspondant) et Simon Piel

Publié le 16 décembre 2020 à 06h00 - Mis à jour le 14 avril 2021 à 11h29 

Les faits datent du 10 novembre, en milieu de matinée, à l’heure où la cité Bassens vit encore tranquillement avant l’ouverture du « drive », l’un des plus importants points de vente de drogue de Marseille. Depuis un véhicule circulant lentement, des hommes vêtus de noir et cagoulés tirent à quarante reprises, en l’air mais pas seulement : un lycéen de 18 ans est touché à l’épaule.

Aussitôt pris en chasse par une patrouille de police secours présente dans le secteur, les occupants du véhicule ouvrent le feu sur les fonctionnaires qui les pourchassent sur plusieurs kilomètres. Le RAID les arrêtera deux heures plus tard, dans une villa isolée de Gignac-la-Nerthe (Bouches-du-Rhône) : quatre hommes âgés de 20 à 25 ans.

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D’autres cités marseillaises, comme la Busserine ou la Bricarde, ont connu ce type d’intimidations, en plein jour. Mais il est rarement arrivé que de si jeunes gens s’en prennent aux forces de l’ordre. Dans le réquisitoire qui a conduit à leur incarcération, le parquet de Marseille évoque « l’écho extraordinaire de ces faits dignes de figurer dans les annales policières ». 

15 millions d’euros mensuels

Ces coups de force de plus en plus décomplexés composent, avec les règlements de comptes, la partie émergée des guerres de territoire entre bandes rivales dans l’agglomération marseillaise. Les chiffres donnent la mesure du phénomène. Depuis 2016, la police judiciaire (PJ) a déjoué vingt-quatre règlements de comptes, parfois juste avant le passage à l’acte. En moyenne, le bilan annuel des victimes s’élève tout de même à une vingtaine de morts.

Deux hommes doivent ainsi comparaître du 12 au 15 janvier 2021 devant la cour d’assises des Bouches-du-Rhône, accusés de l’exécution, le 18 novembre 2016, d’un adolescent de 15 ans, très modeste « employé » d’un réseau de cité. Les mains ligotées, à genoux, il a été tué d’un tir dans le thorax et d’un second dans la tête une fois au sol, avant que son corps ne soit incendié.

Si la police continue de multiplier les offensives – 91 réseaux démantelés et 209 personnes écrouées en 2019 –, elle semble vider la mer avec une petite cuillère

Le commerce de la drogue, que ce soit au détail – au bas des immeubles, dans des dizaines de cités marseillaises – ou en gros via des go-fast, ces convois chargés d’acheminer le cannabis par dizaines de kilos depuis l’Espagne, génère toujours plus d’argent. Le Sirasco, service d’analyse de la PJ, estime à 15 millions d’euros le chiffre d’affaires mensuel du trafic de drogue

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Cités

Marseille, la vie sous les balles

Dans les quartiers Nord, les trois morts de la fusillade du 2 avril s’inscrivent dans un quotidien où la violence des armes s’est banalisée, nourrie par la relégation sociale. De nouveaux tirs ont fait deux blessés ce mardi.

Houria, du quartier Bassens. Son fils était présent dans la supérette mitraillée, mais est indemne. (Photo Patrick Gherdoussi)

par Stéphanie Harounyan, Correspondante à Marseille

publié le 18 avril 2016 

C'est la seule supérette du coin. Autour de la cité Bassens, dans le XVe arrondissement de Marseille, il n'y a que la voie de chemin de fer, la caserne des pompiers et des bâtiments industriels à perte de vue. Pour trouver des commerces, il faut marcher jusqu'au bus 38, qui mène dans le quartier Saint-Louis, à dix minutes de là. La supérette dépanne bien la centaine de familles qui vivent souvent depuis des décennies dans la cité, classée en zone de sécurité prioritaire (ZSP). Les mères viennent y chercher du lait ou du pain. Les jeunes, eux, s'y réunissent les soirs de match, autour de la télé.

Le 2 avril, vers 22 heures, ils étaient une quinzaine à suivre le clasico de foot Barcelone-Real Madrid. Othmane, 21 ans, était devant l'entrée quand les tireurs ont déboulé. «Dès qu'on a entendu les coups de feu, on est tous descendus, raconte «Nanou», une mère du quartier. J'avais mon neveu de 12 ans dans la supérette. Les enfants ont tout vu, le sang, les cadavres… Après, j'ai porté des draps pour couvrir les morts.» Il y en a eu trois ce soir-là : deux trafiquants de drogue présumés, ceux ciblés par les tireurs. Et Othmane, atteint par une balle «perdue» qui a traversé son cœur. Trois autres habitants ont aussi été blessés.

Zone industrielle

Depuis janvier à Marseille, onze personnes sont mortes dans des règlements de comptes souvent liés au trafic de drogue. Un compteur morbide que les habitants de Bassens avaient presque oublié. Jadis haut lieu du trafic, la petite cité des quartiers Nord faisait moins parler d'elle ces dernières années, avec l'arrestation des têtes de réseau, parties en prison. Si les revendeurs de drogue, plus discrets, restent présents, ce sont plutôt les difficultés sociales qui occupent le quotidien des familles. «On vit dans une zone industrielle où pas un jeune ne travaille dans les usines voisines, dit Nanou. On est abandonnés, mais on ne se sentait pas en insécurité. Les trafiquants ne nous embêtaient pas. Maintenant oui, j'ai peur…»

Cet après-midi, comme tous les jours, elle a ouvert le local de l'association des femmes, posté sur la petite place de la cité. Les mères viennent s'asseoir, apportent des gâteaux et, surtout, vident leur sac. Depuis la tuerie, des volontaires de la cellule médico-psychologique ont été dépêchés par les autorités pour accompagner les habitants traumatisés. Une première pour ce type de tuerie, obtenue après l'insistance de la sénatrice-maire PS du secteur, Samia Ghali. «Ça ne leur était pas venu à l'idée tout seuls, s'emporte Nanou. Quand des bêtes se font tuer dans des abattoirs, ils nous font tout un flan. Mais ici, c'est normal que nos enfants voient du sang, vivent dans la précarité !»

A Bassens comme dans les cités voisines, la colère, c'est pour la forme. Cela fait bien longtemps que les habitants n'attendent plus grand-chose de l'extérieur, qui les range dans le même panier que la poignée de trafiquants occupant leur quartier. Nanou ne supporte plus l'amalgame : «Si on n'est pas des terroristes, on est des vendeurs de drogue. Si on n'est pas des vendeurs, on profite du système ! Il y a des gens intelligents qui vont faire la part des choses, et d'autres vont dire que ces tueries, c'est entre eux, on s'en fout !» S'en foutre, ou plus exactement ne plus y prêter attention. «Dans toutes les têtes, du moment que vous êtes là, vous n'êtes pas une victime, résume, amère, Samia Ghali. Ça ne sert à rien d'écrire pour certaines émissions télé "interdit aux moins de 12 ans". Ici, la violence, les enfants la vivent en direct. Ça tire partout, tout le temps !»

Matrice

Abdallah (1) vit depuis toujours dans un arrondissement voisin de Bassens, cité de la Busserine. Des coups de feu, il n'en a entendu «que trois ou quatre fois» dans sa vie. «Pour moi, ce n'est pas souvent, mais est-ce que trois ou quatre fois, c'est pas souvent ?» s'interroge le jeune homme de 20 ans. Le 15 mars, il a entendu les rafales lorsqu'un homme a été abattu devant sa cité. «C'était le grand frère d'un ami. Il faisait ses trafics, mais il a toujours été gentil.» Abdallah a vu beaucoup de ses camarades de classe tomber dans les réseaux. Quand il les croise aujourd'hui dans sa cité, il prend ses précautions. «On n'a pas peur d'eux parce qu'on les connaît, explique-t-il. Mais je ne vais pas rester à côté une heure parce que je sais ce qui peut arriver. Au début, on n'avait pas peur des règlements de comptes parce qu'ils concernaient ceux qui étaient entrés dans une matrice. Maintenant, on dirait qu'ils n'ont plus de conscience. On a toujours vécu dans cette apologie des armes, de la violence. C'est rentré dans l'esprit des gens. Et à un moment, c'est devenu vrai.»

Et ce n'est pas prêt de s'inverser. «Si des gens entrent dans une supérette et se mettent à tirer, le risque de dégâts collatéraux existe», a concédé le procureur de la République de Marseille après la tuerie de Bassens, assurant de la «détermination» des forces de l'ordre à continuer leur lutte contre les réseaux. Coincés entre ces deux feux par la misère sociale, les habitants des cités ne peuvent compter que sur la solidarité qui les unit. A Bassens comme ailleurs, les centres sociaux et les associations tentent d'organiser le quotidien des résidents, depuis les loisirs des enfants jusqu'à l'aide alimentaire. «Les jeunes aussi sont solidaires entre eux, souligne Abdallah. On a tous les mêmes problèmes. Trouver un travail, un logement… On sait que le trafic peut nous sortir de là. Y a ceux qui le font et ceux qui le font pas…»

Deux logiques opposées, qui cohabitent sur un même territoire où «ceux qui le font», pourtant minoritaires, dictent les règles à «ceux qui ne le font pas». «C'est compliqué, corrige Abdallah. Je comprends que de l'extérieur, on puisse s'imaginer que c'est violent, mais nous, on ne s'en rend pas compte. On est nés comme ça.»

Une manière de dire que sur les zones de trafic, la violence s'apprivoise dès le plus jeune âge. Elle imprègne même le décor jusque dans les détails sans que plus personne n'y prête attention, pas même les autorités. Dans l'école HLM-Perrin, toujours dans les quartiers Nord, il a fallu attendre des mois pour que la municipalité change une vitre de classe percée par un impact de balle. Des douilles, les enseignants de l'école Saint-André-la Castellane en retrouvent parfois dans les poches de leurs élèves. «Ce sont des enfants marqués, relève une enseignante. Quand il se passe quelque chose, il faut prendre le temps de parler, leur expliquer que l'école est un lieu sécurisé, parce qu'ils ont peur…» En février 2015, les élèves et le personnel avaient même dû rester confinés une journée dans l'établissement, après qu'une fusillade avait éclaté en pleine matinée. «On vit des choses que l'on n'a pas à vivre, reconnaît l'enseignante. Rester calfeutrés comme ça parce que dehors, les forces de l'ordre tournent avec des hélicoptères… Au début, quand la police intervenait dans la cité, les enfants étaient très excités. Mais maintenant, ils ont banalisé ça. C'est ce qui les sauve : banaliser, c'est une façon de se protéger.»

Harcèlement

Depuis la fusillade de février 2015 à la Castellane, les forces de l'ordre ont choisi la riposte musclée pour dompter le trafic dans ce quartier. Des cars de CRS occupent quasi quotidiennement l'entrée de la cité, multipliant les contrôles d'identité et de véhicules. Une action vécue comme un harcèlement par les habitants. Fatima (1), une mère de famille, en est à sa cinquième amende pour sa voiture : «C'est bien qu'ils soient là, mais pour faire leur travail et empêcher le trafic, pas pour ramasser de l'argent avec des PV et faire pression sur les gens ! Certains se font contrôler trois ou quatre fois par jour !» Mohamed Zerouki, le pharmacien du secteur, cumule, lui, les amendes pour stationnement gênant devant son officine. «Les gens subissent la double peine. Ils espéraient justice et écoute, la police était attendue en sauveuse. Maintenant, on se demande s'il ne valait pas mieux les trafiquants. En plus, le trafic s'est simplement déplacé ailleurs !» La préfecture de police assure le contraire : depuis le début de l'opération, le chiffre d'affaires des réseaux aurait été divisé par quatre. Pas de quoi apaiser le praticien : «Les gens qui venaient de l'extérieur ne viennent plus parce que les CRS font peur. Depuis qu'ils sont là, j'ai perdu 40 % de mon chiffre d'affaires. J'ai peur de tout perdre !»

La supérette de Bassens, elle, est fermée jusqu'à nouvel ordre, le temps de l'enquête. Sur le rideau de fer, les scotchs rouges préviennent : «Scellé, ne pas ouvrir.» Les gosses de la cité, qui se partagent un ballon juste à côté, n'y jettent même pas un regard, pas plus qu'aux trous laissés par les balles dans un volet voisin. Il n'y a plus de traces de sang par terre. Les jeunes de la cité les ont nettoyées après le départ de la police.

(1) Les prénoms ont été modifiés.

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Marseille : La fusillade survenue dans les quartiers Nord « certainement en lien avec le narcobanditisme »

FAITS DIVERS La police a arrêté un commando armé inconnu de la justice à l’origine d’une fusillade dans une cité des quartiers Nord de Marseille connue pour être un haut lieu du trafic de drogue

Mathilde Ceilles

Publié le 12/11/20 à 16h26 — Mis à jour le 12/11/20 à 16h26

Un commando lourdement armé a tiré des dizaines de fois ce mardi dans la cité de Bassens dans les quartiers Nord de Marseille

Les malfaiteurs arrêtés sont presque tous inconnus des services de police

Pour le directeur de la PJ, cette action s'apparente à une opération d'intimidation en lien avec le narcobanditisme

« Nous avons échappé par miracle à des conséquences beaucoup plus graves, que ce soit pour les services de police ou les habitants », lance Dominique Laurens. Lors d’une conférence de presse ce jeudi, la procureure de la République de Marseille et le directeur interrégional de la police judiciaire Eric Arella ont donné de plus amples détails sur l’impressionnante fusillade survenue ce mardi à la cité Bassens, une cité des quartiers Nord de Marseille qui est « un des cinq "plans stups" les plus importants de la ville », selon les termes d’Eric Arella.

Les membres du commando, interpellés très rapidement après les faits, « n’ont pas un passé judiciaire qui attestent d’antécédents liés au narcobanditisme, explique-t-il. Néanmoins, l’action telle qu’elle se commet, une action au moins d’intimidation ou de coup de force pour remonter dans une cité où le trafic de stupéfiant est assez important, n’est certainement pas sans lien avec le narcobanditisme. »

Course-poursuite

Pour rappel, mardi, un commando s’est introduit dans la cité et tiré plusieurs dizaines de balles, blessant légèrement un lycéen de 18 ans, « sans doute une victime collatérale », selon Eric Arella. Sur place, une quarantaine d’étuis seront retrouvés, issus d’armes longues et d’armes de poing. Puis, pris en chasse par un équipage de police secours, le commando tire à trois reprises, avec plusieurs tirs en direction même des policiers au moment où certains malfaiteurs vont changer de véhicule, sur une bretelle d’entrée de l’autoroute A7.

Après cette course-poursuite émaillée de coups de feu vers les policiers à leurs trousses, les forces de l’ordre sont parvenues à arrêter ce commando, retranché dans une villa isolée de Gignac-la-Nerthe, près de Marseille. Quatre hommes âgés de 20 à 25 ans ont été interpellés après l’intervention concomitante de policiers en tenue, des enquêteurs de la BRI (brigade de recherche et d’intervention) et du Raid.

Deux autres personnes, dont une femme de 43 ans, propriétaire de la maison, ont également été arrêtées. Fait étonnant, parmi les personnes interpellées, seules deux sont connues par les services de police. Ce commando était pourtant très équipé : les enquêteurs ont retrouvé dans la maison une balise GPS, des chasubles siglées d’un service de police, un pistolet automatique, un fusil à pompe et également une voiture volée. Deux armes longues et des armes de poing se trouvaient dans le véhicule des malfaiteurs.

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Marseille : des dizaines de lignes sur écoute par jour

Après la mort d'une nouvelle victime de règlement de comptes mercredi soir, la police marseillaise rappelle qu'elle mène des opérations de récupération d'armes ou de drogues tous les jours.

Par Jean-Marc Leclerc

Publié le 31/08/2012 à 18:22, mis à jour le 31/08/2012 à 21:59

Policiers lors d'une opération de lutte contre les trafics de drogues et d'armes dans la cité Bassens, dans les quartiers nord de Marseille, en janvier dernier. GERARD JULIEN/AFP

2021, l’année du rendement ?

Mais que fait la police à Marseille? La réponse en matière criminelle tient en un chiffre: 55 % d'affaires élucidées «judiciairement», c'est-à-dire preuves à l'appui. Pour nombre d'autres dossiers, la police dit avoir sa «petite idée».

La 19e victime de règlement de comptes dans l'agglomération, qui a tant fait parler d'elle ces dernières 48 heures, avait, selon les autorités, «un profil particulièrement agressif». Le bracelet électronique que portait ce voyou ne l'a pas protégé de la trentaine de projectiles de kalachnikov qui l'ont littéralement «découpé», confient des enquêteurs de la PJ.

«Ce truand ne serait pas mort s'il était resté derrière les barreaux», tranche un syndicaliste policier d'Alliance, très inquiet des projets du ministère de la Justice visant à étendre les mesures alternatives à l'incarcération. Selon lui, «la police n'est pas responsable des sorties de prison».

Le QG de la PJ à Marseille, dans l'ancien évêché, accueille plus de 400 fonctionnaires, répartis entre la brigade criminelle, la BRB, l'antigang et les stups. La sécurité publique, police en tenue, dispose, quant à elle, de ses propres services antidrogues qui concourent aux enquêtes.

«Un combat harassant»

Trois fois par semaine, le préfet délégué à la sécurité, Alain Gardère, réunit tous ses directeurs pour définir les objectifs, en concertation avec le parquet. Les opérations de récupération d'armes ou de drogues sont quasi quotidiennes. C'est la technique du harcèlement. «Nous tombons un réseau de deal toutes les trois semaines environ, mais le marché a horreur du vide et les circuits de vente se reconstituent. C'est un combat harassant», reconnaît un commissaire. Depuis janvier, 300 armes à feu ont quand même été saisies, dont 32 fusils d'assaut.

Reste le cas des caïds qui s'entre-tuent et dont la traque repose sur des investigations techniques et un recoupement des renseignements collectés auprès d'indicateurs motivés par la vengeance ou les primes discrètement accordées par l'État. Au bord du Vieux-Port, les tables d'écoute espionnent des dizaines de lignes par jour.

«Les menaces de mort proférées sont fréquentes dans cette ville où les caïds ont le verbe haut, mais on ne peut pas arrêter des malfaiteurs d'envergure sur de simples déclarations. Toute la difficulté est de cerner où et quand aura lieu le passage à l'acte», déclare un pilier de la PJ locale. Pour la 19e victime, en tout cas, il suffisait de suivre la trace électronique de son bracelet.

La police ne peut évidemment se satisfaire des conséquences d'une vendetta qui trouble tant la paix publique. Et elle fait valoir ses succès dans des affaires retentissantes, comme l'arrestation de l'auteur présumé de la fusillade du Clos-la-Rose, qui se solda en 2010 par la mort d'un adolescent de 16 ans et qui fit un blessé de 11 ans.

De même, elle a solutionné le triple meurtre des Pennes-Mirabeau, commis le 26 décembre dernier. Les corps des victimes avaient été retrouvés calcinés dans une voiture. Une «spécialité» du milieu marseillais, pour semer l'effroi et détruire les indices utilisables par la police scientifique. Mais la PJ a de la mémoire…

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«Tout Marseille doit être en zone de sécurité prioritaire»

INTERVIEW - Jean-Claude Gaudin, maire de la Cité phocéenne, veut que toute sa ville soit en zone de sécurité prioritaire.

Par Aliette de Broqua

Publié le 31/08/2012 à 17:48, mis à jour le 31/08/2012 à 21:44

Jean-Claude Gaudin: «Il n'est pas acceptable que seules les circonscriptions de députés socialistes soient classées ZSP, et pas les autres.» © Moura / Alpaca / Andia.fr/© Moura / Alpaca / Andia.fr

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Le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, revient sur les remous provoqués jeudi par le 14e règlement de comptes dans la Cité phocéenne en huit mois et les déclarations chocs de la sénatrice PS Samia Ghali, qui demande l'intervention de l'armée dans les quartiers nord.

LE FIGARO. - La multiplication des règlements de comptes et l'appel à l'armée de Samia Ghali ont décidé le premier ministre à organiser le 6 septembre un comité interministériel sur Marseille. Qu'en pensez-vous?

Jean-Claude GAUDIN. - Marseille n'a pas besoin de surexcitation médiatique, même au plus haut niveau de l'État. Marseille a besoin de lucidité et de fermeté. La police nationale fait, depuis dix mois, des investigations quotidiennes dans les cités. Les résultats sont satisfaisants. Les dealers tueurs des Pennes-Mirabeau ont été écroués. La police a récupéré plus de 300 armes, dont 30 kalachnikovs. Si le premier ministre, qui a tenu des propos caricaturaux jeudi (il a estimé que la ville était «à la dérive», NDLR), s'intéresse à la question, je lui demande de classer toute la ville en zone de sécurité prioritaire (ZSP), comme cela a été fait à Lille. Il n'est pas acceptable que seules les circonscriptions de députés socialistes soient classées, et pas les autres. Il y a eu deux morts brutales récemment dans les quartiers sud.

Avez-vous été consulté à propos du périmètre des ZSP ou de la réunion interministérielle du 6 septembre?

M. Valls m'a informé avant l'annonce des ZSP, mais le premier ministre ne m'a pas appelé. Marseille mérite l'attention du gouvernement. J'ose espérer que le premier ministre me questionnera avant la réunion interministérielle du 6. Autrement, je l'interpellerai au Sénat. Il se trompe en disant que cette ville a trop de retard et trop de chômage. Le chômage n'a pas cessé de reculer depuis que je suis maire, et notamment dans le nord de la ville, grâce à la création d'une zone franche.

Pensez-vous qu'il faut augmenter les effectifs policiers à Marseille?

Marseille a toujours besoin d'effectifs de police supplémentaires, bien qu'il y ait aujourd'hui 3000 policiers d'État et deux compagnies de CRS. Et, puisque le gouvernement précédent avait fait un effort, la municipalité vient de créer 100 postes supplémentaires de policiers et développe la vidéosurveillance. Nous avons désormais 350 policiers municipaux. Longtemps, je n'ai pas voulu qu'ils soient armés. J'ai évolué. Ils vont être dotés d'armes non létales, comme les Flash-Ball, et de gilets pare-balles.

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Le gouvernement ne donne pas de signes constructifs. Pas plus les interventions de Mme la garde des Sceaux, comme l'annonce de la suppression des jurés populaires ou l'inutilité des peines de prison. Ou comme le fait d'avoir relâché, sur ordre du parquet, deux heures après son arrestation, la femme qui avait mordu la policière qui avait voulu contrôler son identité parce qu'elle portait une burqa.

Que dire de la proposition de Samia Ghali d'envoyer l'armée dans les cités pour éradiquer les trafics de drogues?

C'est une solution ubuesque condamnée par tout le monde et qui pourrait amener à une guerre civile. Marseille n'en est pas là. Ici, il y a des gens qui travaillent et qui sont exaspérés par la mauvaise publicité faite autour de ces règlements de comptes. Il y a beaucoup de choses qui marchent bien, comme nos universités, qui ont fusionné, ou nos hôpitaux, où viennent se faire soigner des gens de toute la région. Ces quartiers ne sont pas abandonnés. Nous avons fait pour eux bien plus que ce qui avait été fait par mes prédécesseurs. Il y a des résultats. Il se construit 5000 logements par an, dont 1000 logements sociaux. C'est dans ces quartiers que la ville a réalisé les plus importants investissements en logements, équipements scolaires, sportifs et sociaux. La quasi-totalité des treize chantiers de l'Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) à Marseille s'y trouvent. Un milliard d'euros y sont consacrés.

Qu'attendez-vous de la réunion interministérielle?

J'ai des doutes… Samia Ghali avait dit que, si François Hollande était élu, il y aurait 300 policiers supplémentaires. Ils n'y sont pas, mais s'ils devaient arriver, nous dirions merci!

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La police marseillaise face aux nouveaux caïds de la drogue

La violente guerre que se livrent les trafiquants de drogue de la cité phocéenne occulte le travail de fond mené par la police pour reconquérir les quartiers.

Par Jean-Marc Leclerc

Publié le 30/08/2012 à 20:26, mis à jour le 30/08/2012 à 23:42

Des policiers sur la scène du 19e règlement de comptes de l'année à Marseille, dans la nuit de mercredi à jeudi. GERARD JULIEN/AFP

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Marseille, capitale française du crime? Pour les policiers locaux, il serait injuste d'évaluer la situation de la Cité phocéenne sur le plan criminel à l'aune des seuls règlements de comptes entre malfaiteurs de ces derniers mois.

À les entendre, en effet, il existe une autre réalité, qui témoigne d'un investissement considérable des forces de l'ordre: le préfet de police de la ville, Alain Gardère, assure que «les vols à main armée dans la Cité phocéenne ont baissé de 30 % par rapport à l'an dernier, les vols avec violences de près de 15 %, les cambriolages dans les mêmes proportions». «Et si des truands se fument entre eux, cela se passe aussi ailleurs en France, sans que personne ne s'en émeuve», renchérit un commissaire marseillais.

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La reconquête des quartiers est, depuis dix ans, l'obsession des autorités sur place. «La police judiciaire laboure le terrain», assure Jacques Dallest, le procureur de la République de Marseille. Mais, dans une ville où la tradition de violence est vieille comme le banditisme et sa loi du silence, les enquêteurs doivent s'accrocher.

Tenue autrefois par Gaston Defferre, Marseille fut dans les années 1970 le berceau de la French Connection. Elle a connu la tuerie d'Auriol, le meurtre du juge Michel, la guerre entre les clans Zampa et Vanverberghe, alias Francis le Belge. À l'époque, les caïds étaient les «juges de paix» des quartiers.

100.000 euros de bénéfices par mois

Depuis, les voyous ont bien changé. On est frappé par la jeunesse des victimes des derniers règlements de comptes: 26, 25, 19 et même 17 ans!«Souvent issue de l'immigration, la nouvelle délinquance veut tout tout de suite», assure un limier de la PJ. Elle prospère sur fond de trafic de cannabis, mais aussi, de plus en plus, de cocaïne. Il n'y a plus de chef. On se bat pour un pas-de-porte. «Il suffit d'un peu d'audace et de contacts en Espagne», confie le procureur Dallest.

Le 30 décembre 2011, Le Figaro avait publié la comptabilité d'un dealer de la cité de la Visitation, dans les quartiers nord: 100.000 euros de bénéfices par mois, pour quelques halls d'immeubles. Et dans la ville, ils se comptent par dizaines! «Ajoutez-y des armes de guerre, accessibles pour quelques centaines d'euros, et le cocktail devient explosif», reconnaît un policier de la Bac.Selon lui, «la drogue draine tant d'argent que chacun veut sa part du gâteau.»

Certes, la sanctuarisation du centre-ville porte ses fruits autour du Vieux-Port, où les caméras fleurissent. Mais, pour restaurer l'ordre dans les quartiers, il faudra beaucoup plus que quelques CRS supplémentaires. La rentrée de Manuel Valls commencera par Marseille.

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Marseille, victime du «néobanditisme»

INTERVIEW - Les règlements de comptes se multiplient dans la Cité phocéenne. Le procureur de la République Jacques Dallest décrypte la situation.

Par Christophe Cornevin

Publié le 28/05/2012 à 18:23, mis à jour le 29/05/2012 à 08:34

Fauchées par des rafales de kalachnikov, retrouvées calcinées ou criblées de projectiles de gros calibre dans leur voiture... Depuis le début de l'année, treize personnes ont trouvé la mort dans une série de règlements de comptes souvent intervenus sur fond de trafic de stupéfiants. La Cité phocéenne s'enlise dans la violence. Jacques Dallest, procureur de la République, décrypte la montée en puissance des nouveaux caïds qui ensanglantent la ville.

Cliquez sur l'aperçu pour agrandir l'infographie.

LE FIGARO. - Les règlements de comptes qui endeuillent Marseille n'en font-ils pas une ville à part?

Jacques DALLEST. - Marseille n'est pas la ville la plus criminelle du monde, mais elle figure parmi les cinq plus touchées en France. C'est l'une des plus pauvres, avec un taux de chômage élevé et un brassage de communautés très variées. Sans banlieue mais intégrant des quartiers sensibles, elle s'étend sur 24 000 hectares, soit l'équivalent de Paris et Lyon réunis. C'est un handicap pour la police qui doit être présente partout et intervenir vite. À cela, il convient d'ajouter une vieille tradition de violence et de banditisme. En 1870, il y avait déjà trois fois plus de crimes et délits dans la Cité phocéenne qu'au niveau national. Et les années 1970-1980 ont aussi été marquées par une violence extrêmement dure, marquée par la French Connection, l'assassinat du juge Michel, la tuerie d'Auriol ou encore celle du bar du Téléphone, qui s'était soldée par une dizaine de morts. Sans parler de la lutte entre le clan Zampa et celui de Francis le Belge. Autant dire que les règlements de comptes ne datent pas d'hier#8230;

Comment expliquer les dernières dérives du banditisme?

Par l'émergence d'un «néobanditisme», monté en puissance ces trois dernières années dans les cités. Les protagonistes, jeunes et équipés d'armes lourdes, s'entretuent facilement pour des affaires liées aux trafics de drogue mais pas seulement. Des gens meurent aussi pour des questions d'honneur, de rivalité, de bagarre, de haine. Cette atomisation de la délinquance rend notre lutte plus compliquée que si nous étions face à une guerre entre deux bandes bien repérées. Marseille est morcelée par des clans, des groupes qui veulent dominer une cité, un immeuble, voire une montée d'escalier où prospère un trafic. Ces trafics dégagent jusqu'à 10 000 euros de profit par jour. Cela suscite de forts appétits et une floraison de PME criminelles employant guetteurs, fournisseurs surnommés les «charbonneurs», les «nourrices» qui dissimulent drogue et armes. Comme beaucoup d'argent est en jeu, l'offre de services est importante, surtout en période de crise économique. Cette division du travail permet aux trafiquants de mieux se fondre dans le décor, d'éviter la police#8230;

Justement, que font les forces de l'ordre pour éradiquer ces fléaux?

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2021, l’année du rendement ?

Au cours de l’année 2020, le CAC40 a signé une performance en baisse de 7%. Pour l’année 2021…

Depuis des années, la police laboure le terrain en profondeur avec ses groupes spécialisés dans les trafics de drogue et d'armes. Tout un travail de renseignement est mené par la Sécurité publique avec les brigades anticriminalité (BAC) et par la PJ qui fait de l'infiltration en se postant dans des appartements inoccupés. Mais leur mission est compliquée car les gangs placent des guetteurs même la nuit, pour repérer les intrus. Cela ne nous empêche pas d'intercepter tous les jours de la drogue, des armes et d'arrêter des dealers à Marseille. L'année dernière, plus de 6500 personnes ont été déférées au parquet, dont près d'un millier impliqué pour trafics de stupéfiants. La machine judiciaire tourne à plein régime.

Mais les règlements de comptes ne sont pas toujours résolus#8230;

Oui, c'est compliqué car les assassins préméditent bien leur geste, agissant encagoulés et gantés, sans témoin ni indices, et en se débarrassant des armes. Ils n'hésitent pas à incendier les véhicules utilisés et vont même jusqu'à brûler les cadavres de leurs victimes. Retrouver leur trace dans ces conditions exige des semaines, voire des mois d'investigations techniques. À titre d'exemple, la fusillade du Clos-la-Rose, qui avait coûté la vie à un adolescent de 16 ans et blessé par balles un enfant de 11 ans en novembre 2010, n'a été élucidée que fin 2011. À Marseille, nous arrivons à un taux d'élucidation de 55 %. Nous lançons des appels à la population pour qu'elle nous aide mais les gens craignent les révélations sur procès-verbal, même quand l'anonymat est garanti. On ne leur demande pas d'être des héros, juste d'avoir un sens civique. À l'été 2009, des témoins sous X nous ont ainsi permis d'élucider un double meurtre dans les quartiers sud.

Croyez-vous à un possible retour d'un «juge de paix», figure du milieu susceptible de calmer le jeu?

Non, c'est terminé. Je vois mal un clan dominer soudain toutes les cités de la ville, qui offrent chacune des perspectives d'enrichissement à des tas de voyous locaux susceptibles de monter leur propre business s'ils disposent d'un peu d'intelligence et de quelques contacts en Espagne. Ils ne vont pas demander l'autorisation à un soi-disant «parrain» qui, d'ailleurs, ne s'y intéresserait pas. Par ailleurs, les disparitions brutales en 2011 de Roland Gaben, «parrain» du Panier, ou encore de Souhel Hanna-Elias, alias «Joël le Turc», démontrent qu'il n'y a plus de figure dominante. Quelques figures de la grande criminalité existent toujours et peuvent être actives. Certaines exercent encore une forme de «magistrature» morale dans l'univers de la délinquance. Le recours au meurtre et à la violence reste le marqueur de ce grand banditisme. Mais celui-ci est désormais davantage versé dans la délinquance astucieuse, comme l'escroquerie au droit carbone, la cybercriminalité et le racket de boîtes de nuit. Des pratiques moins exposées, qui rapportent plus que le braquage ou la prostitution. L'ombre du grand banditisme n'apparaît plus dans les «plans» des cités.

«Un banditisme local et étriqué»

Trois questions à Jean-Claude Kella*, impliqué dans la french connection, trafic de drogue entre la France et les États-Unis.

Comment analyser la bouffée de violence qui s'empare de Marseille?

Ce n'est qu'un début et la situation ne va faire qu'empirer pour plusieurs raisons. D'abord, la faim: cette violence augmente en même temps que le chômage frappe les quartiers pauvres. Les gens qui n'ont plus de boulot se précipitent sur tout ce qui rapporte de l'argent. Ensuite, par rapport à notre époque où les armes restaient difficiles à trouver, n'importe qui ou presque peut aujourd'hui trouver une kalachnikov. Enfin, les voyous actuels n'ont plus la même expérience, la même envergure, le même sang-froid#8230; Ils savent à peine se servir de leur artillerie, à la différence des anciens qui avaient appris leurs gammes pendant la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre d'Algérie#8230;

Peut-on, selon vous, parler d'une relève du grand banditisme?

Pas du tout. On assiste avant tout à une libéralisation et à une ouverture des marchés illicites, en particulier celui des stups, qui a longtemps été réservé à un cercle fermé. Pour se lancer dans le business, il fallait être connu, faire ses preuves, se faire parrainer. Maintenant, le premier venu peut rentrer dans le circuit sans même comprendre les risques qu'il prend. Le bilan des règlements de comptes qui se multiplient à Marseille parle de lui-même. C'est contre-productif pour les affaires et les policiers eux-mêmes doivent regretter l'absence d'un équilibre des forces, d'une soupape de décompression qu'imposerait l'arrivée d'un nouveau juge de paix.

À vous en croire, les professionnels auraient cédé le pas aux amateurs. N'est-ce pas exagéré?

Non. Dans la plupart des cas, et d'après ce que je lis, on voit des gamins qui ont perdu tout sens de la réalité, en regardant trop les séries télé. Des films cultes de braqueurs comme Heat leur sont montés à la tête. Ils se croient dans des jeux vidéo et banalisent la mort en voyant sur Internet des histoires de types décapités. En fait, ces jeunes dépourvus de tout respect ont un sentiment de puissance et n'hésitent plus à flinguer pour un billet de 500 euros. Avant, les voyous ne tiraient qu'en dernière extrémité, pour des motifs sérieux. Et quand l'un d'eux se mettait en cavale, il disposait de relais pour se faire oublier en Bolivie ou en Argentine le temps qu'il fallait. Maintenant, les gars n'ont pour horizon que les frontières de leur cité. Ils animent, à quelques exceptions près, un banditisme local et étriqué.

* Auteur de «Hold-up». Éditions Don Quichotte.

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En haut de la colline, on n’a guère le temps d’apprécier la vue sur la rade, pas si lointaine. Le “checkpoint”, à l’entrée de la cité de La Savine, dans les quartiers nord de Marseille, contrôle un par un les visiteurs “extérieurs” : livreurs, médecins, artisans… C’est un passage obligé. Le “douanier” du jour, un jeune homme, torse nu, vêtu uniquement d’un short et de claquettes de plage, est en train de siroter un soda à la paille, à l’ombre d’un parasol.

Un visage inconnu, dans une voiture immatriculée dans un autre département, et voilà qu’il saute de sa chaise en plastique et se met à courir derrière le véhicule. « Eh, eh, toi, là ! Arrête-toi ! » Dans le rétroviseur, il a déjà disparu. Deux cents mètres plus loin, la voiture est rattrapée par deux scooters… Puis bloquée devant une entrée d’immeuble. Impossible de continuer son chemin sans renverser un de ces vigiles du deal de shit.

« Oh, gros ! Pourquoi tu t’es pas arrêté plus haut quand on te l’a demandé ? » Dans cet ensemble HLM plutôt propre, construit au début des années 1970 et récemment rénové, dans le XVe arrondissement, on est prié d’obtempérer. Le conducteur du scooter, un jeune Noir tout en muscles, vient de ranger son talkie-walkie à la ceinture de son bermuda. C’est muni de cet appareil qu’il communiquait avec le premier barrage. L’incident est quasi clos.

« T’es journaliste ? Dégage, on n’a rien à te dire. Allez, fous le camp ! » Impossible de parlementer. Et inutile : à La Savine, on caillasse, on tabasse, on tue même, parfois. La reconduite aux frontières extérieures de la cité s’opère sous cette improbable escorte motorisée, jusqu’au pied de la colline. On se quitterait presque en bons termes.

Car la visite des quartiers nord — plus d’une trentaine sur un territoire qui correspond grosso modo au tiers de la superficie et de la population de Marseille — se passe souvent plus mal. À La Solidarité — surnommée par les locaux “La Soli” —, toujours dans le XVe arrondissement, l’accueil est moins chaleureux, le décor aussi : les façades des immeubles sont davantage abîmées, plus crasseuses également. Le linge pend aux balcons, hérissés d’une multitude de paraboles. Une petite bande de jeunes, assis à un arrêt de bus, lance des cailloux en direction du véhicule. Un projectile rebondit sur le capot d’une autre voiture, posée sans roues sur des parpaings. À la pharmacie du coin, littéralement cernée par les guetteurs, on minimiserait presque : « Ah, tant qu’ils ont l’impression qu’on les laisse faire leur business, ils nous laissent tranquilles ! » C’est pourtant un pan entier de la ville qui est pris en otage, verrouillé de l’intérieur par cette voyoucratie toute-puissante.

Un jeune qui contrôle l’entrée de la cité gagne 100 euros par jour

Habitude, omerta, peur des représailles : les quartiers nord sont taiseux. Dans une boulangerie qui fait face à “La Soli”, la jeune vendeuse a son explication sur ce silence, loin de la faconde méridionale habituelle : « Peuchère, les gens, tant qu’ils habitent ici, ils ne parlent pas, ils ne dénoncent pas… Faut dire que ce sont souvent leurs minots qui font des conneries. »

Les crimes et la délinquance baignent pourtant toujours le nord de la cité phocéenne. Ils s’affichent à longueur des colonnes des faits divers dans la Provence. Les règlements de comptes s’opèrent à balles réelles et de préférence à la kalachnikov, les morts se comptent par dizaines et, pourtant, les habitants veulent donner l’impression que “tout va bien” ou que “tout est exagéré”.

Sur des chaises d’école, un groupe de quatre personnes s’occupant de l’Association sportive La Delorme — dans la cité Bassens, en plein XVe arrondissement — est plus bavard. Le quartier est connu comme un des “plans stup” les plus chauds de Marseille. L’un des plus mortels aussi : trois personnes sont mortes l’année dernière lors d’une fusillade. Un classique.

L’endroit est encore désert. À cette heure matinale, seuls les anciens prennent le café, en face de leur local, non loin de quelques petites maisons mitoyennes qui tranchent avec les barres HLM avoisinantes et à quelques mètres d’un terrain de jeux pour enfants abandonné à la poussière. Non sans quelques réticences, ils consentent à parler : « Valeurs actuelles ? Vous tombez bien, ici, on n’a plus de valeurs ! » Son voisin lui dit de se taire : « Tu vois bien qu’il est là pour dire du mal des cités… » Un « mélenchoniste » — c’est ainsi qu’il se présente d’emblée — se lance : « Va falloir parler du chômage. 40 %, ici ! La vérité, monsieur, c’est que personne n’en a quelque chose à foutre de la jeunesse. Quant aux vieux, ici, ils sont déjà morts. Aucun CDI pour les Arabes, tous discriminés, et on s’étonne qu’ils basculent dans la délinquance… Et puis, vous allez commander, vous, à des jeunes de 16 ans ? »

Les jeunes, justement. Ceux-là mêmes qui contrôlent les accès des principales cités, à raison de 100 euros par jour de “chouf”, vigies travaillant pour des “gérants”, véritables startuppers du marché de la drogue. Combien sont-ils à tenir en coupe réglée les quartiers nord ? Entre les fixes et les ponctuels, ils seraient plusieurs centaines. De vrais petits contrats de travail. Avec certains avantages : tel guetteur obtiendra de se faire livrer sa nourriture. De jour, comme de nuit.

La Castellane, cité où a grandi Zinédine Zidane, ne dort quasiment jamais, surtout en été. Dans ce labyrinthe de béton où survivent quelque 7 000 personnes, les sentinelles sont partout et assurent aux trafiquants un chiffre d’affaires pouvant aller jusqu’à 60 000 euros par jour ! Sur les toits, la nuit, encagoulés, dominent les plus agiles d’entre eux.

Aux abords des rues, sur les trottoirs, ils gardent en main des lampes torches, vautrés dans des canapés crevés et fumant parfois la chicha pour tuer le temps. Défense absolue, là aussi, de pénétrer dans les cages d’escalier où, en plus du deal de drogue, on propose quelques produits d’épicerie : colas, chips, baguettes de pain ! Un univers parallèle où les policiers ont, également, du mal à pénétrer. La moindre incursion des forces de l’ordre et ce sont les “arah”, hurlés à travers les fenêtres d’immeuble, qui retentissent. Un cri emprunté aux fellaghas qui avertissaient ainsi de l’arrivée des militaires français pendant la guerre d’Algérie.

« Quand ils ne mettent pas carrément le feu à des voitures pour faire diversion », témoigne un fonctionnaire du commissariat de la division nord de Marseille. Des policiers qui ne sont pas à armes égales avec les voyous. Véhicules ayant dépassé les 200 000 kilomètres devenus des épaves, sous-effectif qui ne permet pas d’intervenir en sécurité… Leur témoignage se fait anonymement, « pour ne pas se mettre à dos la hiérarchie ». « C’est simple, nous n’intervenons presque plus que pour des différends familiaux… Quand vous interpellez quelqu’un, d’un coup 20 autres personnes débarquent. Nous, on regarde en l’air car on nous jette des rochers et on nous tire dessus au pistolet à plomb. » Inutile de faire du zèle, ce n’est pas bien vu.

Le banditisme d’antan a disparu

Pas étonnant que la plupart des jeunes des cités marseillaises roulent sans casque sur leurs cyclomoteurs : « La direction départementale de la sécurité publique des Bouches-du-Rhône nous interdit de prendre en chasse les gens à deux-roues… Il faut éviter la “saucisse”, c’est-à-dire l’incident. Officiellement, l’administration nous dit que c’est pour nous protéger… On nous explique que la justice ne nous couvrira pas s’il y a un accident. » Résultat : « Les jeunes s’imaginent qu’on les craint. »

Ce sentiment de paralysie, l’ex-major de la Bac (brigade anticriminalité) Gilles Tachon le connaît bien. Ce gaillard de 61 ans, sorte de Serpico local qui a balancé sur les policiers ripoux marseillais en 2012, a procédé au démantèlement, parfois musclé, de plusieurs réseaux de trafic de stupéfiants. Il s’est taillé une réputation de dur à cuire et d’encyclopédie vivante des quartiers nord, où il réside toujours. L’homme est intarissable : « Tenez, ici, c’est là que sont notées les plaques d’immatriculation des véhicules banalisés de police… Ah, j’aurais pu faire guide touristique ici… J’y ai pensé ! » Derrière la bonhomie du personnage, se cache aussi l’exaspération d’un type qui trouve qu’à Marseille, « on veut à tout prix acheter la paix sociale ». « Quand on fait tomber un réseau, les loyers des bailleurs sociaux ne sont pas payés le temps que se remette en place un autre réseau. Si on supprime cette économie parallèle, que reste-t-il ? Quelques allocations. »

La violence, elle, s’est accentuée. Le banditisme à la papa, qui respectait un certain code d’honneur, a disparu. « Avant on se faisait la guerre entre cités. Maintenant on la fait bloc contre bloc, cage d’escalier contre cage d’escalier », note Gilles Tachon. Avec toujours davantage d’horreur… Quand on ne tue pas, il arrive qu’on torture.

« La jeunesse délinquante s’est choisi un modèle : Scarface. Il n’est pas rare qu’on retrouve le poster de ce film dans les chambres des délinquants qui veulent une vie courte, pleine d’adrénaline, avec de la dope et des armes. C’est vrai, il y a un seuil d’acceptation de la violence ici qui n’existe pas ailleurs en France », observe Me Victor Gioia, avocat qui plaide régulièrement pour les victimes des criminels des quartiers nord. « Des victimes de guerre, en fait », souffle le pénaliste. La “guerre” : le mot est souvent employé par les habitants. Une grand-mère, dans une maisonnette près de la cité des Lauriers, se désole que la carcasse d’une petite Citroën, brûlée dix jours auparavant, soit encore dans la rue. « C’est la guerre, ici. Alors, que voulez-vous… On prie pour que les bombes tombent à côté. C’est pas glorieux mais c’est comme ça qu’on survit. Et les politiques s’en foutent ! »

En vacances dans le très chic quartier du Roucas-Blanc, le président de la République n’aura, c’est vrai, quasiment rien vu des quartiers nord. Sinon, peut-être, au travers des vitres fumées de sa voiture. Emmanuel Macron est allé, dans le plus grand secret, s’entraîner plusieurs fois dans la salle de sport du Raid, située dans les locaux du commissariat de la division nord. À l’abri de la presse. Et de la réalité des cités marseillaises.

De notre envoyé spécial,

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Marseille : les trafiquants de drogue affichent leurs tarifs sur un panneau comme au resto !

MARSEILLE 

Marseille : les trafiquants de drogue affichent leurs tarifs sur un panneau comme au resto !

iStock / Getty Images Plus

Les dealers rivalisent d’inventivité pour attirer les clients et améliorer leur communication auprès des acheteurs. Les policiers ont découvert un tableau listant le stock du vendeur de drogue et les tarifs appliqués.

Écrit par Sarah Ugolini

Publié le 28/04/2019 à 17h09

 

Après les tombolas organisées à Grenoble pour les clients, les offres d'emploi dans le quartier de la Solidarité à Marseille, les dealers affichent désormais leurs tarifs sur un tableau comme un menu dans un restaurant ! Comme le rapporte 20 minutes, les policiers ont eu la surprise de découvrir ce jeudi 25 avril dans les quartiers nord de la cité phocéenne une sorte de "panneau tarifaire" utilisé par les dealers lors d'une descente dans le 15e arrondissement. Sur ce tableau utilisé par les membres du réseau, on peut voir les différents prix des stupéfiants mis en vente à cet endroit, mais les effets de la drogue et sa provenance sont aussi indiqués.

On peut ainsi lire que l'herbe appelée "Green Haze" et vendue à 60 euros le pot est d'"un vert éclatant" et permet une "défonce surnaturelle". Le dealer vante également "l'effet citronné qui vous glacera le cerveau" du "Lemon Ice" vendu à 50 euros les six grammes. Les policiers ont trouvé cette sorte de "menu" à l'entrée d'un point de deal comme pourrait le faire un restaurant. On constate que le trafic de stupéfiants remporte un tel succès économique à Marseille, que les dirigeants de ces réseaux calquent même leurs méthodes de recrutement et de marketing sur celles du monde de l’entreprise.

>> À lire aussi : Marseille : les trafiquants de drogue déposent des petites annonces pour recruter

En effet, comme le rapporte La Provence, des policiers avaient découvert il y a quelques semaines des flyers sur le sol qui se sont révélés être de véritables offres d’emploi. "Offre d’emploi. Votre droguerie recrute !", pouvait-on lire sur une de ces affichettes. L’offre prenait la forme d’un emploi régulier et précisait que "l’entreprise" recherchait "un vendeur en temps plein chargé de l’accueil des clients et de la bonne vente". Une annonce qui détaillait même les missions de ce dealer-guetteur recherché qui aurait en charge de "réaliser des contrôles visuels permanents en tout temps". Des dealers d'un quartier de Grenoble sont également suspectés d'avoir organisé une tombola en ligne pour promouvoir leur trafic. RTL précisait qu'une enquête a été ouverte par le parquet de la ville auprès du parquet le mercredi 17 avril dernier.

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Sécurité: à Marseille, la cité Bassens et les barres du "shit"

Pendant que Jean-Marc Ayrault tient une réunion interministérielle ce jeudi sur Marseille pour y stopper les règlements de compte, au pied des immeubles de la cité Bassens à Marseille, les petits caïds règnent sur le trafic de drogue. Pas que par la violence: lui seul ou presque emploie les jeunes du quartier...

SECURITE - Pour mettre un terme au trafic de drogue qui entraine un déchainement de violence à Marseille, un comité interministériel est convoqué par le gouvernement ce jeudi.

Par Laurent Chabrun

publié le 06/09/2012 à 17:24 , mis à jour à 18:24

Actualité

Société

Quelques rares camionnettes se croisent paresseusement aux ronds-points. Ecrasée par le soleil d'août, la cité Bassens, au coeur des quartiers Nord de Marseille, suffoque de chaleur. Dans l'avenue de Boisbaudran, le centre départemental des pompiers aligne ses fourgons de secours, mais les hommes restent dans leurs bureaux climatisés. Sur le trottoir d'en face, assis sur une sorte de promontoire qui marque l'entrée du quartier, un ado trapu vêtu d'un maillot de foot bleu scrute la route. Insensible aux rayons du soleil, il allume cigarette sur cigarette. L'objet de son attention demeure mystérieux, sauf pour ceux venus acheter du "shit", le nom usuel du cannabis. Vacances ou pas, le business tourne à plein régime à Bassens, l'une des deux cités les plus souvent désignées, avec celle de la Castellane, comme l'un des supermarchés locaux de la drogue. 

> A lire également: ce qu'il faut attendre de la réunion interministérielle sur Marseille ce jeudi 

D'un signe de la tête, le guetteur indique qu'il faut poursuivre son chemin. Lui reste concentré sur sa mission, prêt à pousser le cri d'alerte commun à toutes les cités marseillaises, le fameux "Araa" alertant de l'arrivée des policiers. La deuxième étape de ce jeu de piste se situe quelques dizaines de mètres plus loin, au pied d'un des immeubles rose et beige. La présence incongrue d'un ado assis sur une chaise de camping, les pieds posés sur un bac à fleurs, annonce la proximité du point de vente. Ce gamin sur son siège est au dealer ce qu'est la civette au marchand de tabac, une enseigne. A sa vue, le client sait qu'il n'a plus qu'à franchir l'entrée de la cage d'escalier la plus proche. Là, assis sur les premières marches, un grand garçon efflanqué aux cheveux mi-longs attend. Il porte en bandoulière un profond sac noir qui contient son stock et se tient prêt à déguerpir à la moindre alerte. Dans sa main gauche, une liasse de billets en petites coupures pour rendre la monnaie. Du ton d'un guichetier lassé, il s'enquiert de la commande: "10, 20 ou 30 euros?" En échange de l'argent, il tend un petit sachet de plastique transparent contenant un copeau de cannabis.  

100 euros par jour pour vendre de 18 heures à 1 heure du matin

Les clients se succèdent. Deux quadras sportifs attendent leur tour en rigolant. Puis vient un réparateur de climatisation, tout juste descendu de sa camionnette garée sur l'avenue. Plusieurs centaines de Marseillais se pressent ainsi, chaque jour, dans les halls bétonnés et tagués de la cité Bassens. Sans d'ailleurs que leurs va-et-vient discrets ne troublent l'apparente quiétude des lieux. "Le charbonneur [revendeur] que j'ai défendu avait un stock de 100 barrettes de cannabis à vendre et, quand il en manquait, on venait le ravitailler", raconte Me Alain Lhote. Installé dans son cabinet proche du palais de justice, l'avocat feuillette le dossier d'un des revendeurs de shit de la cité. Pincé en flagrant délit par une patrouille de police, il recevait, selon ses dires, 100 euros par jour pour servir les clients de 18 heures à 1 heure du matin. Agé d'une vingtaine d'années, E. a benoîtement expliqué au tribunal qu'il s'agissait là d'un "travail" pour lequel il avait des "horaires"... Consommateur lui-même, E. avait été abordé six mois auparavant par le caïd du coin, qui lui avait proposé ce "boulot". Devant les juges il n'a gardé le silence que sur une seule chose: l'identité de celui qui l'avait embauché. L'omerta règne. 

Condamné à un an de prison, E. n'était qu'un pion dans cette économie souterraine qui prospère sous le béton de la cité Bassens. Car, outre les boss, les "charbonneurs" et les guetteurs, le réseau compte un ravitailleur chargé du réassortiment - la drogue provient du Maroc, via l'Espagne -, un coupeur qui conditionne le cannabis en tranches plus ou moins lourdes, et des complices pour héberger les stocks et les dealers lors des descentes de police. "Ces "nourrices'' sont bien souvent des femmes seules avec des enfants qui ont besoin d'argent pour survivre", constate Me Lhote. "Ceux qui tiennent les réseaux sont les plus gros employeurs des jeunes de Bassens", commente, navrée, une habitante. Et ils savent s'en faire apprécier. L'un des caïds organisait la venue d'un DJ pour les anniversaires. Et quand les mômes du quartier sont partis en vacances à la montagne grâce à une association, c'est lui, grand prince, qui a payé les forfaits de ski pour tout le monde. 

Les trois quarts des familles touchées par le chômage

L'opportunité de gagner facilement de l'argent est d'autant plus séduisante que les jeunes de Bassens, souvent déscolarisés, n'ont pas forcément la possibilité de postuler pour d'autres jobs. "Nous sommes au coeur d'une zone industrielle, et pas un seul gamin de la cité n'a trouvé un travail dans le coin", gronde Malika, membre de l'association locale des femmes. Ancien bidonville né dans les années 1960 pour recevoir les travailleurs algériens, puis les gens du voyage, Bassens reste synonyme de pauvreté. Le chômage touche les trois quarts des 95 familles de la cité où les habitants survivent, bien souvent, grâce à l'aide du Secours populaire. Et il a fallu l'intervention vigoureuse de la municipalité pour que quelques hommes de Bassens puissent être embauchés dans les chantiers de réhabilitation en cours dans les immeubles.  

Noël 2011: trois jeunes, tués par balles, sont retrouvés morts dans une voiture incendiée. 

Face à cette misère, l'opulence des caïds du shit détonne. Un "plan", un "charbon", c'est-à-dire un point de vente, rapporte au minimum 50 000 euros par mois à son organisateur. Et si 25 cités marseillaises sont ainsi gangrenées par le trafic, comme l'affirme le préfet de police Alain Gardère, on peut estimer le bénéfice mensuel des dealers à 1,250 million d'euros au minimum... Qui dit mieux? Pour conserver ce magot et le faire prospérer, les têtes de réseau ont depuis longtemps adopté les règles du commerce traditionnel. On soigne le client en lui offrant le papier à cigarette et l'on multiplie les points de vente en achetant de nouveaux pas-de-porte. Certaines cités encore épargnées seraient ainsi mises en vente par des gangs locaux... Le tarif: plusieurs centaines de milliers d'euros pour une cage d'escalier.  

"Ils préfèrent que les mômes s'éliminent entre eux"

Dans cette jungle de microentreprises de la drogue, la seule loi reste celle du plus fort. Les kalachnikovs, qui permettent d'arbitrer les différends commerciaux, ont déjà fauché 19 personnes depuis le début de l'année dans la région marseillaise. Le dernier règlement de comptes date du 29 août; un garçon de 25 ans tué d'une rafale de "kalach"... Impuissance, exaspération: Samia Ghali, sénatrice et maire (PS) des XVe et XVIe arrondissement de Marseille, née elle-même dans la cité Bassens, en appelle aujourd'hui à l'armée pour rétablir le calme. "Face aux engins de guerre utilisés par les réseaux, il n'y a qu' [elle] qui puisse intervenir. Pour désarmer les dealers d'abord. Et pour bloquer l'accès des quartiers aux clients", a-t-elle tonné dans le quotidien La Provence. Une option rejetée par le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, qui a convoqué une réunion à Marseille le 6 septembre. Et un autre élu local de commenter, désabusé: "Les flics laissent faire, finalement ils préfèrent que ces mômes s'éliminent entre eux."  

"La loi n'est plus d'actualité"

Samia Ghali, élue socialiste de Marseille, en appelle à l'armée pour régler le problème du cannabis.  

A-t-on perdu le contrôle de la situation?

Le cannabis n'est pas un problème strictement marseillais. Il affecte toute la société, mais l'armée n'est pas faite pour chasser les dealers. Pour autant, on ne peut pas rester les bras croisés. Il faut renforcer les moyens policiers et réfléchir à d'autres solutions. 

Lesquelles?

ParaCessons de faire d'une question de santé publique une question politique! Ouvrons le débat, sans a priori, sur l'intérêt d'une légalisation contrôlée de la production, de l'importation et de la vente de cannabis auprès des personnes majeures pour briser le trafic. Cette réforme serait accompagnée de campagnes d'information et de prévention à l'image de ce qui s'est fait pour les cigarettes. La loi de 1970 n'est plus d'actualité. Notre objectif doit consister à lutter contre la consommation, en particulier chez les jeunes, et à privilégier l'efficacité. 

Le 24 juillet dernier, pourtant, les hommes de la brigade de recherche et d'intervention (BRI) ont coincé dans le quartier Bassens un jeune homme de 24 ans, Mohamed L. dit Lamine, suspecté d'être le boss du deal dans la cité. L'opération s'est mal passée. "Il est haut comme trois pommes et les flics l'ont tabassé", grogne une voisine. Selon les policiers, c'est plutôt Lamine qui s'est défendu avec vigueur. Les enquêteurs sont persuadés que cet enfant de Bassens, est à l'origine de l'assassinat de trois jeunes concurrents. Dans la nuit du 25 au 26 décembre 2011, Sonny Alberro, 20 ans, Mohmed Bouhebel, 19 ans, et Nouri Oualan, 19 ans, ont été retrouvés dans une voiture incendiée aux Pennes-Mirabeau, abattus par balle. L'exécution aurait eu pour mobile le contrôle du trafic dans la cité des Micocouliers. 

"Couper la route de l'Espagne"

"Les policiers n'abandonnent pas le terrain", constate Ludovic Girard, directeur de cabinet du maire du secteur. Cela serait, d'ailleurs, bien difficile, la cité Bassens se trouvant à moins de 200 mètres à vol d'oiseau du commissariat du XVe arrondissement... Du coup, les voitures de patrouille remontent fréquemment l'avenue longeant les immeubles, et les dealers, dans un ballet bien réglé, se dispersent comme une volée de moineaux avant de revenir occuper leur poste sitôt le danger disparu. Parfois, aussi, les CRS investissent les immeubles, comme en avril dernier. Mais ces coups de pied dans la fourmilière demeurent sans lendemain. 

"Avant, les jeunes allaient attaquer les routiers ou pillaient les touristes qui se trompaient de sortie sur l'autoroute et débarquaient dans la cité, raconte une vieille habitante de Bassens. Maintenant, ils vendent du cannabis, ce n'est pas pire." Manière de dire que l'économie du shit est devenue, pour certains, un moindre mal dans un univers délabré par la crise. "Une sorte de syndrome de Stockholm s'est même développé, commente un travailleur social. Certains habitants en arrivent à éprouver de l'empathie pour ces jeunes qui les tiennent pourtant en otages par l'exercice de leur commerce, mais qui, finalement, maintiennent le calme." 

Les chiffres du cannabis

Le cannabis est le produit illicite le plus consommé dans notre pays. Plus de 1 million de Français en seraient des usagers réguliers et un demi-million en fumeraient quotidiennement. Les policiers interpellent en moyenne plus de 100 000 consommateurs chaque année. Le coût de ce travail policier est estimé à 300 millions d'euros pour l'Etat français. Selon certains spécialistes, les taxes prélevées sur un cannabis "légalisé" pourraient faire entrer 1 milliard d'euros dans les caisses. Cette même mesure appliquée aux Etats-Unis rapporterait plus de 6 milliards de dollars. 

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Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, a annoncé qu'il voulait "couper la route de l'Espagne" pour stopper l'arrivée du cannabis à Marseille et rétablir l'ordre dans les quartiers les plus violents. Mais à Bassens, cette déclaration martiale fait rigoler. "Ce sont des mots", balaie Malika. Pour elle et son association de femmes, le seul signe d'espoir viendrait plutôt de la cité elle-même. Cette année, six jeunes du quartier ont décroché leur baccalauréat. Une petite mais une vraie victoire.

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Un trafic de drogue "Drive" démantelé dans la cité Bassens à Marseille

Cinq personnes ont été interpellées après le démantèlement d'un trafic de stupéfiants dans la cité Bassens, dans le 15e arrondissement de Marseille. Les dealers approvisionnaient leurs clients avec un service de livraison en Drive directement dans les voitures. 

Publié le 16/01/2017 à 15h31 • Mis à jour le 13/06/2020 à 02h49

9,4 kilo de résine de cannabis et d'herbe, de l'argent liquide et des armes ont été saisis à la cité Bassens à Marseille. • © police 13

Bouches-du-Rhône Marseille Métropole Aix-Marseille

Le client venait en voiture passer commande, sans se donner la peine de quitter le volant. Des petites mains assuraient le service, comme dans un Drive pour livrer la marchandise directement à la voiture. La marchandise en question était de la résine de cannabis.

Les enquêteurs de la sureté départementale et de la brigade des stupéfiants ont travaillé conjointement pendant trois mois pour venir à bout de ce trafic de stupéfiants qui tournait efficacement sur la cité Bassens, une cité du 15e arrondissement de Marseille, depuis un bon moment. La surveillance discrète des policiers les a conduit jusqu'au lieu où était cachée la drogue.

Le 10 janvier dernier, une opération de police a permis d'interpeller les têtes du réseau et leurs lieutenants, cinq hommes d'expérience, âgés de 35 à 40 ans. Les perquisitions ont permis de saisir 9,4 kilos de résine de cannabis et d'herbe, près de 11.000 euros en liquide, deux fusils de chasse, un pistolet automatique 9mm et des munitions. 

A l'issue de leur garde à vue, vendredi, les cinq suspects ont été présentés à un magistrat, mis en examen et écroués.